Gérard Bertrand : l'histoire d'une success story languedocienne

L’an dernier, en 2023, Gérard Bertrand a été sacré meilleur vigneron de l'année 2023 par le magazine professionnel britannique The Drinks Business qui, tous les ans, publie son classement des 100 meilleurs vignerons de l'année. Propriétaire d'une dizaine de vignobles dans le Languedoc et fondateur d'une société de vins sobrement appelée "Gérard Bertrand", l'homme n'a pourtant pas toujours travaillé dans la vigne. Du ballon ovale jusqu'au nectar bacchique, retour sur le parcours romanesque de l'homme aux mille hectares.

Un enfant du Languedoc

Né en 1965 à Narbonne, Gérard Bertrand est un véritable enfant languedocien qui, comme beaucoup de ses camarades, a grandi plus ou moins au milieu des vignes. Plus que d'autres en tout cas, puisque son père, Georges Bertrand, a fait l'acquisition du Domaine de Villemajou en 1973, après un début de carrière dédié au négoce du vin. Mais ici, sur le terroir de Boutenac, ce ne sont pas tant les vignes qui intéressent Gérard, qui leur préfère le ballon ovale.

Sa carrière dans le rugby

Bien avant de se passionner pour le vin, Gérard Bertrand a connu une première vie sportive dans laquelle il était un talentueux rugbyman. S'il a débuté sa carrière au sein de l'équipe locale du RC Narbonne, celle-ci a pris fin en 1994 où, en tant que capitaine du Stade Français, il a permis à l'équipe francilienne d'accéder à la division B2.
Si l'homme avait tout pour poursuivre une brillante carrière sur le terrain, la vie a fait qu'il a dû troquer ses crampons contre des bottes d'agriculteur, pour reprendre les rênes du domaine viticole familial de Villemajou.

Son retour sur ses terres natales

En 1987, le décès de son père Georges, disparu dans un dramatique accident de voiture, précipite le destin de Gérard Bertrand au chevet de la propriété familiale de Villemajou.
S'il tente dans un premier temps de concilier sa carrière dans le rugby avec celle qui l'attend dans le vin, l'homme stoppe complètement la première pour se dévouer entièrement à la deuxième.
Nous sommes en 1994 et le néo-vigneron et jeune sportif retraité a rendez-vous avec ce qui sera finalement encore autre chose qu'une carrière de vigneron : une carrière de business man.
Pour cause, dès 1997, les vignes du domaine familial ne lui suffisent plus. Performant par déformation professionnelle et exigent dans l'âme, il rêve déjà de révéler les terroirs du Languedoc et d'en conquérir pour cela les meilleures parcelles qui les balayent.
Aussi, dans la foulée, il crée la société des vins Gérard Bertrand pour y développer une importante gamme de vins languedociens.
Petit à petit, il investit tous azimuts et acquiert plusieurs propriétés dont le confidentiel mais exceptionnel Clos d'Ora, situé sur la partie la plus haute du cru de Minervois-la-Livinière.
A la fin des années 90, il découvre la biodynamie au détour d'une lecture et s'y essaye sur une poignée d'hectares, puis sur quelques dizaines... jusqu'à atteindre la colossale surface de 1000 hectares, entièrement cultivés en biodynamie.

Une success story qui perdure

Finalement, 30 ans plus tard, Gérard Bertrand est considéré comme une figure emblématique des vins du Languedoc, à l'échelle nationale comme internationale. Plus concrètement encore, il est reconnu pour avoir été un fer de lance de la viticulture durable en Languedoc.
Souvent décrit comme un homme qui a fait beaucoup de bien à l'appellation, il en a en tout cas acquis, sur les meilleurs crus, une honorable ribambelle de 16 vignobles.
De l'appellation la plus occidentale du Languedoc qu'est le Malepère jusqu'à l'extrême opposé de la région, au cœur de l’appellation Terrasses-du-Larzac, chaque domaine, chaque château est situé sur des terroirs où la géologie et le climat ne sont jamais comparables avec un autre.
De cette diversité, l'homme aux mille hectares en a développé, comme il en avait l'intention, d'innombrables gammes de vin qu'il exporte sans difficulté aux 4 coins du monde dans plus de 150 pays.
Régulièrement récompensés, certains de ses vins sont coutumiers des prix internationaux, à l'instar de la cuvée rouge du Château l'Hospitalet (AOC La Clape), élue meilleur vin rouge du monde en 2019 par l'International Wine Challenge (IWC). Un titre qu'a également décroché le rosé du Clos du Temple, un an plus tard.
S'il produit des vins prestigieux et, il faut le reconnaître, onéreux, Gérard Bertrand n'a pas eu le péché d'orgueil de ne produire que des vins difficiles d'accès au plus grand nombre.
S'il a à la fois permis de tirer le marché des vins du Languedoc vers le haut en termes de qualité et donné l'exemple de la valeur ajoutée à laquelle qu’un tel niveau d’exigence peut générer, sa grande taille lui a dans le même temps permis de faire des économies d'échelle considérables et de se positionner ainsi comme un acteur compétitif sur les vins d'entrée ou de milieu de gamme.
Finalement, plus qu'un vigneron, Gérard Bertrand est devenu une success story à part entière qui, à l'instar d'un Michel Chapoutier, a construit une marque forte sur un modèle de viticulture avant-gardiste et hautement rentable.
La société des vins Gérard Bertrand, au-delà d’une marque, est devenue un empire qui abrite aujourd'hui un "Wine Resort Beach & Spa" au sein d'un complexe hôtelier de luxe situé au Château l'Hospitalet, dans le massif de la Clape ; trois restaurants ; un spa ; ainsi qu'un festival de jazz qui accueille chaque année plus de 1000 visiteurs.